mardi, septembre 30, 2025
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Éditorial : l’intelligence artificielle : progrès ou fracture sociale ?

L’intelligence artificielle (IA) s’invite partout : dans nos téléphones, nos administrations, nos hôpitaux, nos emplois. Elle promet efficacité, rapidité et nouvelles opportunités. Mais derrière cet enthousiasme, une question essentielle demeure : qui profite réellement de ce progrès, et qui risque d’en être exclu ?

L’IA répond à nos questions en ligne, sélectionne des curriculum vitæ (CV), analyse des examens médicaux, pilote des voitures ou des drones.

À grande vitesse, elle s’installe dans nos vies quotidiennes. Ses promoteurs promettent une société plus efficace, plus rapide, plus moderne. Mais derrière cet engouement, une inquiétude grandit : l’IA rapprochera-t-elle les citoyens… ou creusera-t-elle une nouvelle fracture sociale ?

Alors que certaines entreprises et certains pays récoltent des bénéfices colossaux, des pans entiers de la population restent sur le bord du chemin. Les emplois peu qualifiés sont menacés, l’accès aux services automatisés devient un obstacle pour les moins familiers du numérique, et les décisions prises par des algorithmes opaques peuvent accentuer les inégalités.

Imaginez une passagère devant embarquer : la compagnie impose désormais de remplir le formulaire en ligne avant le vol. Sans ordinateur et peu à l’aise avec le numérique, elle se retrouve stressée, perdue et à risque de manquer son vol. Ce simple formulaire illustre comment l’automatisation peut exclure les plus vulnérables.

L’IA n’est pas neutre : elle reflète les choix de ceux qui la conçoivent et la contrôlent. Comprendre ses enjeux, réguler son usage et garantir un accès équitable sont des impératifs. Le véritable défi n’est pas seulement technique, il est avant tout sociétal.

L’automatisation crée des gains de productivité, mais elle supprime aussi des emplois, notamment dans les secteurs administratifs, logistiques ou commerciaux. Les métiers précaires sont les premiers touchés. Ce sont encore une fois les travailleurs déjà fragiles qui risquent d’être les laissés-pour-compte de cette révolution.

À cela s’ajoute un autre danger : les algorithmes ne sont pas neutres. Ils reproduisent parfois les biais et discriminations présents dans la société. Dans le recrutement, certains candidats sont écartés simplement parce que leur nom ou leur adresse « ne passent pas » dans un logiciel. On le voit aussi dans la surveillance numérique, qui s’étend dans les transports, les espaces publics et même les démarches administratives.

Et que dire de la fracture numérique ? Une partie de la population, faute de moyens ou de formation, peine déjà à suivre ce rythme. Remplir un simple formulaire en ligne est parfois un parcours du combattant. Or, les services publics se digitalisent à marche forcée, oubliant que derrière chaque formulaire se trouve un être humain qui peut se sentir perdu, exclu, invisible.

L’IA peut être une formidable opportunité si elle est encadrée, transparente et mise au service de tous. Mais si elle devient un outil au service de quelques-uns, elle accentuera les inégalités et renforcera l’exclusion.

La vraie question n’est donc pas de savoir jusqu’où ira la technologie, mais quel usage nous, comme société, voulons en faire. Car le progrès ne se mesure pas à la puissance des machines, mais à leur capacité à améliorer la vie humaine, sans jamais remplacer ce qui fait notre dignité : la relation, la justice, l’attention à l’autre.

L’IA est une révolution comparable à l’électricité ou à Internet. Mais si nous laissons l’automatisation se développer sans garde-fous, elle risque d’élargir le fossé social au lieu de le combler. Le vrai défi n’est pas technique, il est humain et politique : construire une société où la machine assiste l’homme, sans jamais le remplacer.

AISSEGNAIMON – Juriste-communicatrice
FasoInfos.com | Éditorial du lundi

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